Il est certain, ou bien fort probable, ou bien tout à fait possible qu’un matin, un soir, voire même un midi, alors que vous êtes tranquillement sur la route vers le travail, vers le marché, voire même vers une manifestation quelconque, vous soyez tombés, en plein milieu de la chaussée, du trottoir ou du sentier…
non, je pense pas que j’aie des choses à dire, de belles choses qui chatouillent les beaux sentiments, des questions qui soulèvent la poussière des idées reçues, des réponses qui soulagent les angoisses des insomniaques, un message d’une quelconque sagesse à transmettre au monde, tout a été déjà dit, fait, écrit, redit, chanté, plein de…
oui, je pense vraiment que ce concept de hasard a été inventé par des gens qui n’ont pas trouvé, n’ont pas cherché, ne se sont pas efforcés de découvrir une meilleure explication, de meilleures réponses à des questions qui effraient, parce que, honnêtement, franchement, avouons-le, pas facile d’assumer la responsabilité pour certains de ses actes,…
non, je pense pas que je vais tenir encore longtemps comme ça, je sens vraiment que je déborde, que je dégouline, que je me déverse, si je ne fais pas quelque chose bientôt chaque cellule de mon corps va éclater, exploser, détoner, bombe atomique éradiquant chaque particule autour de moi, big bang viscéral balayant tout…
oui, je pense bien que ça va le faire, si je me lève à quatre heures, je pense avoir le temps de finir les quatre pages qui me restent à écrire, finir de corriger les coquilles, les erreurs, les maladresses, tout vérifier, tout enregistrer, tout envoyer, préparer le café, les tartines, le lait au chocolat,…
non, je pense pas que ce soit si difficile de tout arrêter, de tout quitter, de tout recommencer, autrement, il suffit de faire le premier geste, le premier pas, ne pas se lever un matin, ne pas répondre à ce mail si urgent, ne pas donner cours à cette requête si pressante, ne pas prendre…
oui, je pense vraiment qu’elle va revenir ce soir parce que j’ai tout bien fait comme il faut, j’ai mangé les tartines ce matin, sans en mettre partout, j’ai bu la tasse de lait, sans verser une seule goutte, je me suis bien brossé les dents, bien trois minutes, j’ai fait mon lit tout seul,…
non, je pense pas que je puisse y arriver, j’ai trop de bagages, trop peu de temps, je suis déjà trop en retard, vraiment, je pense pas pouvoir m’en sortir, la grosse valise se défait sans cesse, le sac en toile n’arrête pas de tomber de mon épaule, la bouteille d’eau commence à couler sur…
oui, je pense vraiment qu’il m’aime, ça ne peut être que ça parce que ce matin déjà en histoire il m’a prêté sa gomme sans même que je la lui demande et avec un long sourire et un regard si interminable qu’on s’est fait reprendre par la prof, et en maths il a poussé son…
non, je pense pas qu’on puisse survivre, je pense qu’il est déjà trop tard, beaucoup trop tard, la glace a déjà trop fondu, il n’y aura bientôt plus d’Arctique, plus de forêts, plus de savanes, plus de saisons, plus de pluie, plus de neige, les coupures d’électricité sont déjà monnaie courante, on vend des bunkers…
bastramu 